L’impact des biais cognitifs appliqués au marketing
Quels sont les ressorts psychologiques susceptibles d’altérer nos choix professionnels, mais aussi de transformer les perceptions de nos clients et prospects marketing ? Retour sur un live exceptionnel dédié aux biais cognitifs, organisé conjointement par Atout DSI et Abiléo.
Les biais cognitifs sont des mécanismes de la pensée qui induisent une déviation systématique du raisonnement logique et parfois du comportement rationnel.
« Biais d’optimisme », « fléau de la connaissance », « effet de retour de flamme »… Les biais cognitifs sont nombreux, avec des impacts significatifs dans la plupart des domaines de la décision et de la communication.
Nous avons eu le plaisir d’échanger avec Jean Daunizeau, directeur de l’équipe de recherche « Motivations et Comportements » au sein de l’Institut du Cerveau pour un atelier de travail digital pragmatique et inspirant.
Retour sur quelques fondamentaux partagés par le chercheur mais aussi quelques exemples observés au quotidien chez Abiléo. Ouvrons ensemble les portes de notre cerveau.
Qu’est-ce qu’un biais cognitif ? Sont-ils courants ?
Pour Jean Daunizeau, « le biais cognitif est une altération systématique dans notre manière de prendre une décision ou de porter un jugement. Ce n’est pas une erreur au hasard mais au contraire une erreur très systématique. Et il y en a énormément ! ».
Ce dernier nous l’a prouvé simplement avec la restitution d’une étude réalisée par des chercheurs israéliens.
« Des psychologues se sont intéressés à la manière dont des juges prennent leur décision de remise en liberté conditionnelle. Nous parlons donc de personnes rationnelles, à la recherche d’arguments mais vous le verrez, les résultats sont surprenants. Voire effrayants. »
Découvrez ce graphique qui indique le taux de OUI (favorable à une remise en liberté) tout au long d’une journée classique de jugements.
Extraneous factors in judicial decisions. Danziger et al. (2011), PNAS: 108 (6889–6892).
On y observe que le taux de OUI est à 65 % en début de journée. Il tombe à 0 % avant la pause déjeuner, pour remonter à 65 % au retour des juges et redescendre inlassablement avant une seconde pause.
« Et vous ? Quelle heure choisiriez-vous pour votre jugement ?
Ce qu’il faut comprendre ici, c’est qu’il n’y a aucune raison que l’heure de la journée influe sur une telle décision. Cela ne veut pas dire que les juges sont aléatoires quand ils sont fatigués. Mais plutôt qu’à mesure qu’ils fatiguent, ils ont tendance à dire non.
Ils restent sur un statu quo. En effet, si la liberté conditionnelle est refusée à un instant T, rien ne change. C’est l’opportunité de laisser une situation telle qu’elle est, pour la rejuger plus tard. Autrement dit : pas de prise de risque ! »
Si vous êtes convaincu par l’importance des biais cognitifs et le fait que tout un chacun peut y être confronté, laissez-nous vous parler de deux biais cognitifs fondamentaux.
Cinq biais cognitifs fondamentaux appliqués au marketing
Le biais de confirmation
Le biais de confirmation est la tendance à rechercher une information pour renforcer son propre a priori. Il nous rend sourd à l’information contradictoire.
« Faisons un test. Dites-moi quelle est la ville la plus peuplée entre Niamey et Ottawa ?
Et indiquez-moi votre niveau de confiance pour cette réponse entre 0 et 10.
Je vous dirais ensuite que 3 personnes sur 4 pensent que Niamey est plus peuplé que Ottawa.
Il est facile de penser que si l’information confirme votre réponse, votre niveau de confiance pourrait augmenter. Et de la même façon, que si l’information est contradictoire, votre niveau de confiance pourrait baisser.
Pourtant sur 1 000 personnes sondées, on observe que si les personnes qui ont une information cohérente avec leur point de vue augmente bien leur niveau de confiance, celles qui ont une information contradictoire ne changent pas leur niveau de confiance. En d’autres termes, ils négligent l’information contradictoire et la remettent en question. »
En marketing d’influence, cela fait écho à l’effet de mode et de communauté.
- Dès lors que les personnes auxquelles je me réfère adoptent un produit, je deviens plus enclin à l’acheter. Je suis persuadé que je fais le bon choix. Le fait d’appartenir à une communauté ne me donne pas envie de rechercher plus d’information sur le sujet.
- D’où l’importance des témoignages clients en B2B ! L’influence de mes pairs est primordiale.
Le biais d’optimisme
Le biais d’optimisme nous fait croire que les évènements plaisants sont plus probables que les évènements déplaisants. Avec lui, on surestime la probabilité d’obtenir des résultats favorables.
Un fan de l’équipe française de rugby va parier facilement pour une victoire française lors d’un match mythique contre une équipe anglaise placée favorite. Les chances de l’emporter sont minces mais il désire tellement que cela arrive qu’il se persuade que cela est tout à fait plausible.
En marketing comme dans l’ensemble de nos actions professionnelles, nous retrouvons ce biais. Et il fait du bien non ? Attention cependant à ne pas trop réduire notre perception des risques !
Le biais de manque
Le syndrome FOMO (fear of missing out) traduit la peur de rater quelque chose. Elle est souvent associée à une anxiété sociale caractérisée par la peur constante de passer à côté d’une information importante.
Lorsque vous scrollez à l’infini dans votre feed Instagram ou LinkedIn. Vous faites face à ce syndrome.
En marketing, la peur de perdre ou de manquer s’appuie sur de fortes réactions émotionnelles. Les clients ne veulent pas rater une occasion d’acheter un produit en édition limitée ou de profiter d’une bonne affaire.
Pour utiliser ce biais cognitif, les marques jouent souvent sur l’urgence et les promotions. En marketing BtoB, un des leviers marketing en fin de parcours de nurturing est la relance dite hardsell. On propose par exemple 15 jours de test gratuit de sa solution. Une offre disponible uniquement sur une période définie et courte.
Le biais du chiffre de gauche
Vous avez très certainement remarqué que les produits et solutions que l’on achète sont rarement proposés à des chiffres ronds. Et pour cause ! Pour un produit à 99,90 euros, le client retient le montant de 99 euros et non 100 euros. Ici la barrière psychologique joue un rôle important.
Le biais de cadrage
Voici un exemple concret pour comprendre rapidement le biais de cadrage. Si l’on vous dit qu’un médicament a 80 % de chances de marcher. Vous avez d’avantage tendance à vouloir le prendre que si l’on vous indique qu’il a 20 % de chances d’échouer.
Projetez-vous à présent sur nos exemples marketing. Il n’est pas rare de lire des chiffres comme « 88 % des clients sont satisfaits ». On donne ainsi une bonne impression. Pourtant, si l’on change de perspective, ce chiffre peut mettre en lumière que 12 % de clients sont « insatisfaits ». Soit plus d’un client sur 10 !
Il n’existe pas moins de 250 biais cognitifs référencés.
Lesquels vous viennent à l’esprit ? Quels sont ceux qui s’appliquent au marketing selon vous ?
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